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mardi 30 décembre 2014

RIP Leelah Alcorn.

Voici un petit post qui ne va pas du tout être gai, mais vous devez vous en doutez puisque "RIP" signifie que quelqu'un est mort. 
Cette personne, elle s'appelait Leelah Alcorn. 

Leelah était une adolescente de 17 ans, qui est décédée il y a deux jours. 
Leelah était transgenre.
Leelah s'est suicidée. 

Si elle s'est suicidée, c'est à cause de la société : on lui a interdit d'être pleinement ce qu'elle était, ce qu'elle se sentait être au plus profond d'elle-même. Une femme.

Leelah était un être humain, et aucun être humain ne devrait vivre pareil calvaire, aucun être humain ne mérite de ne pas être respecté, de ne pouvoir être heureux et de se suicider parce que la dépression est trop forte.

Je vous joins le post Tumblr de Leelah, où elle explique pourquoi elle se suicide.



Je vous invite aussi à réfléchir, à réfléchir beaucoup et longtemps au mal que vous pouvez faire. Les transgenres et les transsexuels ne doivent pas être persécutés - oui, j'appelle ça de la persécution - par la société. Acceptez-les. 
Ils sont des gens comme vous et moi, mais ils ne sont pas cis-genres, c'est tout. Ils veulent seulement se sentir mieux dans leur peau. Etre heureux. Qui ne veut pas de ça ? Laissez-les vivre. 
De même, l'homosexualité n'est rien de plus que de l'amour. Si vous avez peur de l'amour, je ne peux plus rien pour vous. 

J'espère qu'un jour les transsexuel(le)s, les transgenres, les homosexuel(le)s, et les bisexuel(le)s pourront vivre leur vie tranquillement, sans que personne ne vienne user de violence de toute sorte sur eux.
Ce jour-là, l'humanité aura fait un grand pas en avant.

Sylphide.


dimanche 28 décembre 2014

L'image médiatique de la femme est-elle dégradante ou dégradée ? Partie I : la perfection inaccessible.


Voici un nouvel article un peu spécial : en fait, il s'agit d'un dossier qu'avec une de mes amies nous avons réalisé dans le cadre de l'ECJS (Éducation Civique, Juridique et Sociale). Le sujet que nous avons choisi, est, comme vous avez pu le lire plus haut "L'image médiatique de la femme est-elle dégradante ou dégradée ?". Nous vous proposons donc une réponse à cette problématique.
Comme le dossier est assez long - 54 pages .. -, je le posterai en plusieurs fois, pour ne pas que cela devienne trop ennuyeux. 
Je vous laisse donc découvrir la première partie de notre analyse, "La perfection inaccessible".

Introduction :

Les femmes luttent depuis le début du XXe siècle pour faire valoir leurs droits : par exemple, les suffragettes se sont battues, au Royaume-Uni, dès 1903, pour obtenir le droit de vote : c'est chose faite en 1918 pour les femmes de plus de 30 ans, et en 1928 toutes les femmes majeures – soit de plus de 21 ans – sont autorisées à voter. Le combat des suffragettes constitue une première vague féministe. Par ailleurs, les femmes américaines obtiennent le droit de vote en 1919 et les femmes françaises en 1944.
Dans les années 1960, une deuxième vague féministe se répand avec le Women's Lib (Women's Liberation Movement) aux États-Unis. Celui-ci est suivi par un équivalent en France, le Mouvement de Libération des Femmes (MLF), dès la fin des années 1960 et plus particulièrement dans les années 1970.
Ainsi fil des années les femmes ont réussi à obtenir un certain nombre de droits et de lois, favorables à leurs réclamations : par exemple, la loi Neuwirth de 1967 permettant l'utilisation de la contraception ; la loi Veil de 1975 rendant légale l'interruption volontaire de grossesse (IVG) ; la loi Roudy de 1983 sur l'égalité professionnelle entre hommes et femmes. Cela marque une affirmation de la femme, dans une société où elle a toujours été dominée et rabaissée.

Néanmoins, nous pouvons remarquer que les femmes n'ont actuellement pas le même statut que les hommes dans notre société, et qu'elles souffrent du sexisme, qui exacerbe les différences entre hommes et femmes : les salaires sont plus élevés chez les hommes travaillant au même poste que les femmes, celles-ci gagnant en moyenne 19,4 % de moins que leurs confrères masculins en 2014 ; la représentation des femmes en politique qui reste peu élevée avec seulement 27 % de députées et 25 % de sénatrices en 2014 ; ou encore la présence moindre des étudiantes dans les filières scientifiques, qui sont seulement 30 %.
Cependant, les inégalités ne s'arrêtent pas aux milieux du travail, de la politique ou des études supérieures : les médias peuvent aussi véhiculés des inégalités, dans la différence de traitement qu'ils accordent aux êtres humains selon leur sexe.

Nous allons donc nous demander, à travers notre étude, si l'image actuelle de la femme dans les médias est effectivement dégradée et dégradante.


I- La femme dans les médias : une image incontestablement dégradante.

1) Une image manipulée et idéalisée : la perfection inaccessible.

L'idéal de beauté a énormément changé au fil des siècles et des années : les exigences et les attentes de notre société ont évolué, au même titre que la mode. Au XIXème siècle, cet idéal est celui-ci d'une peau pâle, de formes généreuses, et de cheveux bruns, alors que dans notre société occidentale du XXIème siècle la perfection physique est celle du bronzage sans défaut et de cheveux blonds. Ainsi, le temps et les mœurs sont responsables des changements de l'idéal de la beauté. De cette façon, les célébrités féminines des années 1930, qui étaient des icônes de mode à leur époque, ne séduiraient pas autant notre société actuelle qu'elles l'ont fait il y a plus de quatre-vingt ans : elles ne correspondent plus à la notion de perfection physique.


Le principal problème est qu'actuellement, la femme se retrouve face à un idéal de beauté revendiqué et exigé par la société en général à travers les marques de cosmétique, de vêtements, ou de maquillage mais également par les hommes alors que cet idéal que beaucoup de femmes cherchent à atteindre désespérément leur est en réalité inaccessible.
Au début du XXème siècle, nous pouvons supposer qu'il était plus simple de correspondre à l'idéal féminin : cela est dû au manque de moyens techniques des créateurs de publicités de l'époque, qui ne pouvaient faire énormément de retouches sur les photographies de leurs mannequins. Aujourd'hui les logiciels de retouches se comptent par centaines et leur utilisation est devenue indispensable aux publicitaires : cela leur permet de perfectionner les images, et de mieux faire vendre leur produit. Toutefois, la femme montrée dans les campagnes de publicité n'existe pas – puisqu'elle est retouchée – et c'est un leurre qui est répandu dans la société.

La femme de notre époque se retrouve donc avec une image de ce qu'elle doit être tellement idéalisée par les publicitaires ou les responsables marketing de grandes marques, qu'il lui est simplement impossible de l'atteindre. Ainsi les médias donnent aux femmes une image d'une perfection et d'un idéal qu'aucune d'entre elles – même les plus belles – ne seront en mesure d'égaler. Effectivement, les mannequins faisant des photographies, qui sont supposées compter parmi les plus belles femmes de la Terre sont elles-même tant retouchées, que la perfection semble inégalable, inatteignable pour chacune d'entre nous.
Ainsi, pour correspondre à l'idéal physique féminin attendu par la société et les médias, il faudrait être une chimère tout droit sortie d'un logiciel de retouche – et préalablement mise en beauté par nombre de produits de maquillage et de coiffure – mais bien entendu, cela est impossible.

Voila les 3 étapes d'une modification physique faite par la marque Dove, dans le but d'atteindre l'idéal de beauté instauré par la société et les médias* :

Dans un premier temps le mannequin est maquillée, coiffée, et donc elle subit une sorte de première retouche : effectivement, il est impossible de reconnaître la jeune femme entre l'étape une et l'étape deux. Elles ne semblent rien avoir commun, sauf leur position et le maillot de bain rouge. La première est pâle, a un air fatigué voire malade, et des cheveux courts et lisses alors que la seconde a une longue cascade de cheveux blonds parfaitement bouclés, est très maquillée, et a un bronzage parfait. (voir image ci-dessous).

Etape 1.
Etape 2.

 Enfin le mannequin est métamorphosée grâce à un logiciel de retouche sur ordinateur : ses jambes sont allongées et amincies, ses rondeurs disparaissent, sa couleur de peau est éclaircie. Son visage est lui aussi totalement modifié, avec des yeux agrandis et des joues amincies.

Etape 3.

Nous pourrions même croire qu'il s'agit d'une femme en plastique parce qu'elle ressemble énormément à une poupée Barbie.

Les femmes dites «lambda» se retrouvent donc confrontées à une société qui manipule autant leur image qu'elles-mêmes. Pendant un certain temps la retouche publicitaire à outrance du physique féminin était caché au grand public : la société n'avait donc pas conscience de la vision erronée et artificielle de la beauté qui était véhiculée. Encore aujourd'hui, même si nous connaissons l'existence de logiciels de retouche et des miracles pouvant être faits par la chirurgie esthétique ou le maquillage, qui peut totalement modifier un visage – notamment avec la technique du contouring* –, beaucoup de femmes prennent pour modèle les mannequins diffusées par les médias.
Cela engendre de nombreux dégâts sur les adolescentes, qui à cette période de leur vie sont très sensibles à l'image qu'elles renvoient d'elles-mêmes et au regard et jugement de la société sur leur physique. Les femmes des publicités étant magnifiées et ayant bien évidemment une silhouette très fine – en réalité trop fine – a provoqué chez des femmes fragiles à la recherche d'une identité sociale – en particulier des adolescentes – un mouvement de masse : celui des régimes minceurs, dans le but d'obtenir un jour le même tour de taille que les mannequins des publicités ou des magazines féminins. Par ailleurs, avant l'été ou les fêtes, les injonctions de ces magazines sur la nécessité d'entamer un régime ne manquent pas. Certains de ces régimes sont draconiens, comme celui du Docteur Dukan qui bannit dans un premier temps les légumes et féculents.

* contouring : technique de maquillage qui permet de changer la forme de votre visage : un fond de teint clair vous permettra d'illuminer certaines parties de votre visage alors qu'un fond de teint foncé permettra de les creuser. 
  
"Garde ton calme, ne mange pas, et tu auras ce thigh gap".
Par ailleurs, les régimes minceurs, suivis ou ayant été suivis par 23,6 % des Français de plus de 18 ans en 2010 sont dangereux pour la santé, ce qu'indique une étude réalisée par l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail). Effectivement, tous les régimes et ce sans exception, entraînent des déséquilibres nutritionnels, et des carences alors que 80 % des individus ayant suivi un régime reprennent du poids après l'arrêt de celui-ci. Les principaux risques pour la santé causés par les régimes sont la «perte de la masse musculaire, et par conséquent, un affaiblissement, [...]une diminution du capital osseux, […] des troubles du rythme cardiaque et des risques cardiovasculaires, […] et des troubles digestifs» (Magazine Psychologies, Novembre 2010). Au niveau psychologique, les régimes peuvent provoquer une mauvaise estime de soi, voire une dépression.
De plus, cela peut entraîner une terrible maladie qu'est l'anorexie, qui peut stopper la croissance des adolescentes, leur fait perdre leurs règles, et peut causer la mort, à terme ; ou encore la boulimie, qui consiste à manger énormément puis à se forcer à vomir ce que nous venons d'avaler.
L'année dernière, le phénomène du «thigh gap» chez les adolescentes était l'incarnation du problème de l'image faussée de la femme dans les médias : en effet, les jeunes filles adoptaient des régimes minceurs – ou «oubliaient» certains repas – afin d'obtenir un écart entre les cuisses, symbole de minceur et donc de beauté.
Extrait du court métrage Supervénus.


Le problème est que quoi que la femme fasse, elle n'a aucune chance de ressembler à l'image que la société lui renvoie. Le seul moyen de s'en rapprocher est de se faire opérer et donc de se ''retoucher'' réellement, avec la chirurgie plastique.



Les femmes dites parfaites dans notre société sont de la sorte des femmes en plastique qui n'ont quasiment plus rien de naturel. Un court métrage animé, Supervénus, réalisé par Frédéric Doazan est très intéressant car il dévoile l'excès de ces pratique et montre de la même manière les changements des attentes de la société par rapport à la perfection féminine.

L'aspect dangereux des canons de l'esthétique, est que la société sait qu'elle ment au travers des médias sur l'image de la femme, et que l'idéal de beauté attendu ne peut pas être atteint. Cependant, elle fait tout pour que les femmes croient que cela est possible et attend d'elles qu'elles se conforment au diktat de la beauté. Ainsi c'est grâce à une image changée et inaccessible que la société manipule les femmes, et par la même occasion leur met une pression incroyable, en les culpabilisant : ce que sous-entend la diffusion de cette image de «femme parfaite» est que si les femmes ne sont pas minces, grandes, élancées, avec une peau bronzée, elles ne sont pas assez bien, pas assez belles pour être dignes d'intérêt.
Le second problème concerne les hommes : ceux-ci se retrouvent confrontés à des femmes sans aucun défaut – car retouchées –, à travers les différents médias. S'ils ne sont pas avertis du travail préalable de retouche qui a été effectué sur ces femmes, ils attendront alors des femmes «réelles» qu'elles correspondent à cet idéal de beauté, ce qui leur est pourtant impossible. Cela accroît aussi la pression qui pèse sur les femmes. 
 
Le dernier problème est relatif aux enfants, et plus particulièrement aux petites filles, à travers la poupée Barbie : la société attend des femmes qu'elles soient à l'identique des poupées Barbie, c'est-à-dire qu'elles soient très grandes et maigres, avec de longues jambes – comme les mannequins –, des hanches peu marquées et fines, sans aucun poil, et surtout sans imperfections au niveau du visage : j'entends par là des boutons, des cicatrices, des rides, des tâches de soleil, etc, soit tout ce qui pourrait faire d'elles des êtres vivants.
Or cela est impossible, dans un premier temps car les femmes comme les hommes ont tous des morphologies et des corps différents. De plus les femmes ont naturellement des hanches marquées et larges puisque la nature veut que ce soit elles qui portent les enfants durant neuf mois dans leur ventre : ainsi leur corps est ainsi adapté à l'accouchement. Il n'est donc pas imaginables pour une femme d'avoir les hanches quasi inexistantes de la célèbre poupée.
Si Barbie n'a pas de poils c'est tout simplement parce qu'elle est en plastique. Chaque être humain possède des poils, cependant ce duvet est perçu très différemment selon le sexe, ce qui justifie que Barbie n'en est point : chez les hommes, cela est un signe de virilité, voire de maturité puisque les premiers poils de la barbe ou de la moustache sont l'un des critères physiques de passage à l'âge adulte ; au contraire, chez la femme, les poils sont vus par la société comme une preuve de manque d’hygiène, et procurent ainsi du dégoût et un rejet.

La poupée de Marvel est la poupée la plus célèbre dans le monde : par conséquent, elle est
énormément médiatisée. Chaque petite fille désire obtenir ou a déjà possédé une ou plusieurs poupées de ce type.
Le problème majeur est le suivant : dès leur plus jeune âge les petites filles s'identifient à ce modèle de la femme qui leur est donné, un modèle qu'elles n'arriveront pourtant jamais à reproduire, ou du moins pas sans risques.
Effectivement la célèbre poupée possède une taille très fine, une poitrine généreuse et un sourire charmant, mais une étude a prouvé que si les poupées Barbies étaient de vraies femmes, faites de chair et d'os et non de plastique, alors elles souffriraient de sous-poids et de malnutrition. Néanmoins, aucune petite fille n'est informée de cela, et aucune d'entre elles peut imaginer les dangers que cette taille de guêpe pourraient avoir sur leur organisme, et sur leur vie. En somme, ils se pourraient que les poupées Barbie aient une influence considérable sur l'apparition de l'anorexie chez les jeunes filles.
Le site MademoiZelle.com indique par ailleurs : « En 2006, les professeurs en psychologie Helga Dittmar, Suzanne Ive et Emma Halliwell ont publié un livre sur leurs expériences. Dans un chapitre intitulé Est-ce-que Barbie donne envie aux filles d'être mince ? Les effets de l'exposition expérimentales d'images de poupée sur la perception du corps chez les filles âgées d'entre 5 et 8ans, elles analysent l'influence des différentes poupées sur les enfants de sexe féminin. Celles qui jouaient avec des Barbie avaient tendance à se sous-estimer et un plus grand désir d'être plus fines que les autres. Une façon comme une autre de foutre un gros taquet par anticipation au rapport au corps de ces futures adultes». 
 
Barbie sans et avec maquillage.
Étant le modèle d'un nombre incalculable de petites filles, ces poupées parfaites jouent un rôle considérable dans la construction des enfants, et ont leur part de responsabilités dans le mal-être physique des femmes : en effet, il est donné aux femmes, dès leur plus jeune âge, une représentation de la femme qui est erronée et leur apprend à être belle, peu importe ce qu'il advient. Ceci pourrait être considéré comme une manière de les endoctriner et de les enfermer dans leur condition de «femmes de plastique», avant d'être des «femmes en chair et en os».
L'artiste Nicolay Liamm a réalisé une version plus réaliste et surtout plus humaine de la poupée Barbie : après des recherches effectuées au centre de la prévention et de contrôle des maladies, l'artiste a trouvé les mensurations des poupées Barbie. Toutefois, il a aussi créé par ordinateur une femme miniature avec des mensurations raisonnables, et correspondant à celle de l'adolescente américaine moyenne, âgée de dix-neuf ans. Il a par la suite maquillé et habillé sa création de la même manière que la célèbre poupée, et a comparé les deux prototypes. (voir image ci dessous).



Comme nous pouvons le constater, la poupée de Nicolay Liamm est plus fidèle à ce que sont vraiment les femmes. Au-delà de cela, l'artiste a prouvé que la poupée Marvel standard est effectivement en sous-poids. D'après ses recherches, les mensurations de celle-ci sont 91-46-84 tandis que celles d'une jeune femme de dix-neuf ans sont 81-78-84. De la sorte, si Barbie était une personne réelle, elle pèserait cinquante kilogrammes et aurait un indice de masse corporelle de 16,24 : elle serait donc considérée comme en état de famine – un IMC entre 21 et 17 étant déjà un signe de maigreur –. Si Barbie voudrait être en bonne santé et posséder une corpulence normale, il faudrait qu'elle ait un IMC de 20,2 : nous sommes donc bien éloignés de ce résultat.

Nicolay Liamm conclut lui-même que « […] les Barbie peuvent avoir une influence négative sur les jeunes filles».



Ainsi la société manipule les femmes, les hommes et les enfants, sur l'image de la femme. Il y a peu de temps, les grandes marques de cosmétiques, ou autres produits qui s'adressaient aux femmes et qui détournaient l'image de celle-ci pour atteindre une beauté factice ont dévoilé au grand public la réalité de leur publicités. Par exemple, en 2006, la marque Dove a clairement affirmé que l'idéal de beauté qu'elle diffusait dans les médias n'était pas réel, à travers la campagne Dove Evolution.

Malgré la conscience d'être manipulée par les médias, la société attend toujours de la femme qu'elle se conforme aux diktats de la beauté. Nous retrouvons ici une forme de sexisme puisque la société n'attend pas des hommes qu'ils soient des êtres divinisés et parfaits et qu'ils ressemblent le plus possible à ceux que l'on perçoit dans les publicités masculines, moins retouchées – ou du moins, la société exerce une pression de moindre mesure sur les hommes –.  
Suis-je parfaite maintenant ?
Les femmes, quant à elles, continuent de vouloir mincir à outrance et de vouloir ressembler aux femme des publicités, qui sont elles-mêmes inexistantes.
Il y a donc ici dégradation de l'image de la femme dans les médias : nous pourrions croire qu'il s'agit d'une valorisation, mais nous nous tromperions totalement. En effet, les canons de l'esthétique qui nous sont imposés nous dégradent dans le sens où ils nous obligent à correspondre à une image erronée de déesses, alors que nous sommes seulement des êtres humains, avec nos défauts ; et dès lors, si nous ne sommes pas ces chimères parfaites, nous nous sentons dégradées, inférieures, avec nos corps «normaux», qui n'ont pourtant rien à se reprocher.


*J'avais déjà évoqué la campagne Dove Evolution, le contouring et le problème de l'importance de l'apparence physique dans un autre article, "Aie ne sois pas".


Sylphide.

vendredi 5 décembre 2014

Cinquante nuances de ... critique.


Ayant un peu de temps pour écrire, je vous propose une critique du best-seller mondial ... Cinquante nuances de Grey
Si vous êtes un(e) fan inconditionnel(le) du roman, ne lisez pas cet article ou alors, si justement, lisez-le, puisque nous ne devons pas nous écrier débat, sauve qui peut ! 

Pour ceux ou celles qui ne connaissent pas l'intrigue, la voici : 

"Anastasia Steele accepte de remplacer sa colocataire malade, Katherine, pour interviewer l'homme d'affaires et milliardaire Christian Grey. Jeune PDG séduisant et mystérieux, ce dernier l'intimide. A sa grande surprise, Christian Grey vient la voir au magasin où elle travaille, prétextant des achats. Très attirée par lui, elle se verra rapidement devenir sa soumise. Pour cela un contrat va être rédigé pour permettre de définir les règles de ce jeu dangereux. Cependant, ce contrat devient souvent un sujet tabou et sera changé sans cesse.
À mesure que leur relation progresse, la jeune et innocente Ana est confrontée à un tout nouvel univers aux côtés du riche entrepreneur. Christian a cependant une face sombre : il est adepte du BDSM. La jeune femme doit alors décider si elle est prête ou non à entrer dans cet univers" 
(Source : Wikipédia)



Sachez que cette critique ne se fonde pas sur les romans mais sur la bande-annonce que j'ai vu du film, qui est celle du 14 Novembre 2014. J'ai donc tiré des conclusions de ce trailer, et je sais que s'attaquer à un best-seller n'est pas chose simple, mais j'ai encore le droit de m'exprimer. Et puis, je considère que tout le monde peut réagir avec civilité, sans me noyer sous les insultes parce que Cinquante nuances de Grey, ce n'est tout simplement pas pour moi. 


La seconde chose à savoir est que ce qui me dérange dans le roman/film n'est pas le sadomasochisme : je considère que chacun a ses pratiques sexuelles, et que cela ne dépend que de notre individu. Évidemment, comme dans toute relation sexuelle, le consentement est obligatoire. Après, ce que chacun fait de son corps, ça le regarde.

Bien, j'ai donc regardé la bande-annonce du fameux ouvrage, car j'avais lu qu'il n'était pas du tout bon pour l'image de la femme -ce sur quoi je reviendrai-. Il y a donc deux semaines, je décide de m'informer et je recherche le trailer. 


En le visionnant de nouveau peu avant de rédiger cet article, j'ai remarqué que les antagonismes entre les deux personnages, Christian et Anastasia sont réellement exacerbés. Effectivement, les six premiers plans jouent sur leurs différences de niveau social : Christian enfile une chemise qu'il choisi dans un placard parfaitement rangé et uniquement fait de costumes alors qu'Anastasia, elle, prend une chemise dans une petite armoire où s'entassent ses vêtements. Le PDG fait un nœud de cravate, cravate qui était elle aussi pliée et rangée avec soin alors que la jeune femme noue ses cheveux sans y prêter trop attention. Christian est conduit en limousine, et Anastasia conduit sa propre voiture. 
La bande-annonce nous permet donc bien de comprendre dès le départ qui est qui : Christian est un jeune homme beau, riche, fort (il est très musclé), jeune et intelligent (puisqu'il est PDG) alors qu'Anastasia ne semble être rien de plus que la fille banale par excellence.

La première rencontre entre les deux futurs amants renforce encore plus le contraste, le mur qui les sépare : Anastasia a des vêtements qui n'égalent en aucun cas l'élégance de Christian, sa jupe est longue et parait trop grande, elle porte une chemise à fleurs un peu désuète. 

Par ailleurs, durant l'interview tout concourt à nous montrer que Christian est puissant, plein de succès et qu'Anastasia n'est rien à côté de lui : tout d'abord, la vue en contre-plongée écrase la jeune femme, et elle semble minuscule dans l'immense bureau de M. Grey. 
Christian apparaît aussi dès le départ comme le personnage masculin mystérieux : le gris est déjà une couleur évocatrice, car on ne sait pas très bien si elle relève plus du noir ou du blanc, plus du mal ou du bien, et là est tout le doute. Rien que dans son nom, le personnage nous échappe, et cela permet de le rendre plus attirant. Ensuite, quand nous le voyons faire son footing, il garde sa capuche sur la tête et nous ne pouvons apercevoir son visage : là encore, Grey ne peut être cerné. Il est indéchiffrable.
Enfin, le personnage de Christian semble manipulateur, calculateur : il affirme avoir la faculté de percer les gens à jour - alors que lui-même est un mystère -. A ce moment-là, Anastasia apparaît clairement intimidée par le PDG.



Un peu plus loin, nous apprenons que Grey est un "maniaque du contrôle" : cela renforce donc l'image de PDG calculateur, froid, distant qui s'impose (d'autant plus que le gris qui envahit les vêtements, les bureaux, et tout l'univers du personnage - et même le temps -  renforce cet aspect). Et, enfin, comme nous pouvions le supposer avec ce tableau si cliché, nous retrouvons la dernière caractéristique fatale : Christian est un "bad boy". Il dit clairement à Anastasia qu'elle devrait l'éviter, que ce n'est pas un homme pour elle. Le message est simple : il est dangereux, il va la briser, la détruire. Et en plus d'être le mauvais garçon, il apprend aussi à sa nouvelle amante qu'il a eu une enfance difficile : Christian est donc un être torturé. Cependant, Anastasia se fait sauveuse de celui-ci, puisqu'il avance au cours de la bande-annonce qu'elle est entrain de le changer. 

Une dernière remarque sur la bande-annonce en elle-même : Anastasia se métamorphose peu à peu et goûte aux plaisirs de la vie, elle devient rayonnante, porte de magnifiques robes et vole en hélicoptère et en avion, choses qu'elles n'auraient pu faire sans l'argent de Grey, évidemment. 


Bien, nous voyons donc qu'une opposition claire s'immisce entre les deux personnages, entre la naïve, banale et outsider Anastasia, et le beau, fort, intelligent, froid, calculateur, et riche Grey.

Ce qui me gêne clairement ici, est que nous avons le droit à un cliché assez insupportable, répété dans l'imaginaire collectif depuis bien longtemps : effectivement, s'opposent la souillon et le prince charmant, comme dans Cendrillon. Et Anastasia n'accèdera au rang de "princesse" que par les moyens de Christian, qui a les moyens financiers de transformer sa vie en conte de fées, si je puis dire. C'est donc le même schéma qu'avec Cendrillon. La femme n'acquiert une reconnaissance sociale et un statut élevé que par l'intermédiaire de l'homme, elle n'est pas du tout capable de le faire elle-même. Par ailleurs, cela implique aussi qu'elle est dépendante financièrement de Grey : sans lui, sans son argent, elle n'aurait jamais les robes merveilleuses et le voyage en avion. 
J'ai l'affreuse impression qu'il va lui briser le poignet ..
De ce point de vue là, l'intrigue me dérange car l'homme et la femme ne sont dès le départ pas placés sur un pied d'égalité. Il y a cette idée de la fille que personne ne regarde qui sort avec la star du lycée, comme dans High School Musical, et c'est tout simplement insupportable de voir que la femme n'accède à la "popularité" que par le biais de son petit ami. Elle ne s'accomplit pas ou ne se fait pas acclamer par ses qualités, son intelligence, le prix qu'elle a gagné en chimie, la compétition qu'elle a remporté, ou ses talents d'humoriste mais parce qu'elle est avec Grey. Grey est déjà quelque chose lui, il a tout eu, tout fait, et est l'archétype du gars qui a tout réussi (beauté, intelligence, force, puissance, argent), alors qu'Anastasia elle, n'est rien sans Christian. Rien du tout. 

La deuxième chose que je trouve exaspérante est l'idée éternelle du "bad boy". En fait, le problème est que le "bad boy" est rendu ici attirant par tous les moyens : son mystère, son côté torturé, sa beauté etc. Il est hypnotisant, et Anastasia ne peut s'en défaire. Le problème est que malgré qu'elle sache pertinemment que Grey va la détruire - il le lui dit lui-même, et jusqu'à preuve du contraire, elle a des oreilles et un cerveau -, elle fonce droit dans le mur, et en jouit même.
De plus, il faut savoir que le roman écrit par E.L. James est à l'origine une fanfiction de l'univers de Twilight : Ana est Bella et Christian, Edward. Ainsi, si nous transposons les deux intrigues, nous en reviendrons à la chose suivante : Ana = humaine et Christian = vampire. Ils ne peuvent donc pas être ensemble, ils appartiennent à deux mondes différents qui sont incompatibles et Christian risquerait de la tuer. Ici, le côté vampirique de Grey se traduirait donc par son sadomasochisme -je suppose-. 
Bien, je ne pense vous apprendre grand chose en affirmant que le vampire est un prédateur - et oui, il boit le sang de ses victimes, et les tue -. Or, sous couvert que Grey est un bad boy diablement attirant, son aspect prédateur ne semble pas compter : Ana se jette dans ses bras. Pourtant, le sadomasochisme et le côté autodestructeur et destructeur de Grey risquent de la vider de son sang et de la tuer, à terme. Mais, peu importe.
Ce constat me gêne terriblement. Parce que quand vous lisez un roman, vous avez le réflexe de vous identifier aux personnages. Vous êtes une femme, et vous allez vous identifier à Anastasia. Très bien. Anastasia est une proie, et elle laisse le prédateur l'attraper, elle veut même qu'il l'initie à ce monde obscur qu'elle ne connaît pas. Et qu'allez-vous faire, vous ? Vous allez reproduire, si vous êtes trop naïve. Ainsi, vous vous précipiterez droit sur le "bad boy", celui dont vous saurez pertinemment qu'il vous brisera le cœur, mais comme Ana, vous espérer le changer. "C'est un connard, mais avec moi, il est différent". Et vous y croirez. Et vous tomberez de haut (du moins, il y a beaucoup de chances). 
Quant à l'homme qui lit ce roman et s'identifie naïvement lui aussi, il reproduira le schéma du prédateur briseur de cœur, qui peut se permettre de tout faire, même les pires horreurs, puisque la fille lui pardonnera dans tous les cas, et l'aimera.
(Ne venez pas me dire que le processus d'identification est un leurre, des jeunes filles désiraient un cancer pour devenir les nouvelles Hazel Grace, après avoir lu Nos Étoiles Contraires)

Enfin, le dernier aspect effrayant de cette œuvre est sans doute le plus fondamental, est qu'une étude américaine a montré que les réactions d'Ana à la violence dans le couple étaient "typiques de celles des femmes mal traitées". Par ailleurs, cette même étude montre que les femmes lisant Cinquante nuances de Grey auraient plus de chances de se faire harceler et d'avoir des vies difficiles, désordonnées. Le pire est sans aucun doute que cette étude révèle qu'Anastasia souffrirait d'un syndrome de Stockholm sous-jacent : pour ceux ou celles qui ne le savent pas, ce syndrome est développé par les otages par rapport à leurs geôliers, c'est-à-dire qu'ils commencent à ressentir de l'empathie ou de la sympathie pour la personne les détenant. Ce qu'implique ce roman est donc extrêmement grave, d'autant plus que le processus d'identification naïf pourrait provoquer de véritables drames, et que c'est un best-seller mondial. Je trouve cela alarmant. 

Ainsi, si le roman n'avait pas mis en scène une soumission de la femme à l'homme sous tous les plans, et que les deux personnages se valaient (Ana aurait pu avoir tout réussi, être intelligente, belle, riche etc aussi), peut-être que cela aurait pu être intéressant - le sadomasochisme aurait pu aller dans les deux sens, par exemple -. 

Présenté tel qu'il l'est, le roman/film véhicule donc des idées dangereuses, auxquelles l'on peut rapidement s'identifier et se confondre, se projeter, voire vouloir reproduire la même chose.

Si les films et les livres représentent une immense source de plaisir pour notre imaginaire, traitez-les avec précaution et n'oubliez jamais votre esprit critique


La femme n'est pas la soumise de l'homme ou dépendante de lui, et Cinquante nuances de Grey ne nous le fera pas croire. 



Sylphide.