Bonjour à tous et à toutes ! Aujourd'hui, parlons d'un sujet qui fâche tous les élèves français en fin de cursus.. La philosophie. Cette discipline faite de réflexion et de sagesse est en effet au programme de tous les Terminale passant le baccalauréat général ou technologique. Pour faire face à la détresse de certains à l'approche de cette épreuve qui ouvrira le bal le 17 Juin prochain, voici un petit concentré de conseils et astuces pour réussir son épreuve de philo !
L'attitude à adopter en cours :
Tout d'abord, quelques mots sur les cours de philosophie en eux-même. Je vous conseille très fortement, si vous voulez réussir l'épreuve, d'être attentif et de prendre des notes. C'est tout bête, mais la philosophie est une matière que nous découvrons totalement en Terminale, alors ouvrez grand vos oreilles et écrivez ce que vous raconte votre professeur(e), d'autant plus que le manuel est dépourvu de cours.. Il contient seulement des jeux de textes. Aucun chance de rattraper votre retard, donc !
N'hésitez pas non plus à poser des questions, à demander ou à chercher vous-même des définitions de concepts à la bibliothèque, sur Internet. L'essentiel est de s'assurer que vous avez bien assimilé les connaissances, et que les pensées des divers penseurs forment un tout cohérent dans votre tête.
Enfin, le dernier conseil pour les cours est de .. lancer des débats ! Et oui, peut-être que vous n'êtes pas du tout d'accord avec Descartes : pour vous, la subjectivité se conquiert par le langage et non pas par la conscience. Partagez-le avec votre classe, et essayez d'échanger vos idées, car c'est en devenant acteurs du cours du philosophie que vous le comprendrez au mieux. Par ailleurs, n'hésitez pas à faire des liens entre vos cours et l'actualité ou d'autres disciplines.. Établir des parallèles est un autre moyen de s'approprier les diverses pensées que vous allez étudier au cours de l'année.
Les révisions :
J'ai souvent entendu des commentaires assez désinvoltes sur l'épreuve de philosophie, d'élèves m'assurant qu'en philo, on peut y aller en mode yolo, c'est-à-dire sans réviser : après tout, il ne s'agit que de penser, et ça, tout le monde sait a priori le faire. Il me semble qu'il s'agit là de la plus grosse erreur à faire en philosophie ... Je ne remets en doute les capacités de personne, mais il est capital de s'appuyer sur des grands penseurs et philosophes qui ont fait évolué la pensée humaine.. Eux sont des spécialistes, et malheureusement, pas encore nous, pauvres élèves de Terminale. De plus, qui de mieux que Nietzsche ou Bergson pour faire évoluer votre réflexion ? Ne les sous-estimez pas!
Maintenant que nous sommes au point sur la question des révisions, et bien, il faut les commencer. Le mieux est sans doute de vous faire des fiches de révisions parce qu'elles participent de votre appropriation du cours et donc de votre assimilation de celui-ci ! Personnalisez votre fiche avec votre méthode personnelle, et pas avec celle de la voisine, et votre cours vous paraîtra immédiatement plus clair parce qu'il vous ressemblera. Nous sommes tous différents, surtout en matière d'organisation. Déterminez le format - polycopié ou fiche Bristol ? -, les moyens mémo-techniques - présence de couleurs ? surligner ? souligner ? - , les mots-clefs - dates, auteurs, ouvrages, concepts - qui vous paraissent les plus importants et lancez-vous ! L'idéal est de faire ses fiches tout au long de l'année pour ne pas être pris de cours au mois de Juin ; mais là aussi, cela tient à chacun.
Quand vos magnifiques fiches de révisions sont prêtes, il ne vous reste plus qu'à les apprendre. Par cœur ou non, cela dépend aussi de vous et de votre mémoire. Un planning de révisions équilibré peut être un moyen de se donner des objectifs et d'avoir une perspective, de savoir quand est-ce que les révisions commencent et quand est-ce qu'elles prennent fin. Bien sûr, ne vous surchargez pas ! Vouloir apprendre la moitié du programme en deux heures est ridicule. Espacez vos temps de travail, et n'oubliez pas de vous reposer et de vous amuser entretemps : vous en serez d'autant plus motivés !
N'hésitez pas non plus à faire quelques entraînements en temps réel de dissertations ou de commentaires de texte. C'est par la pratique régulière que l'on progresse.
Dernière astuce : apprenez des citations ! Celles-ci retracent vos cours et sont essentielles dans une copie de philosophie pour démontrer votre connaissance et votre maîtrise du cours. Néanmoins, n'essayez pas d'apprendre une citation de dix-huit lignes - histoire véridique - pour la replacer sur votre copie.. Le but n'est pas de vanter votre érudition, mais d'organiser une réflexion, une pensée. Privilégiez des citations plutôt courtes ("L'Enfer c'est les autres" (Sartre), "Je pense donc je suis" (Descartes), "Les mathématiques sont une science dans laquelle on ne sait pas de quoi on parle, ni si ce que l'on dit est vrai" (Russell)) ou de vos auteurs préférés : elles seront à coup sûr plus simples à retenir !
La fameuse dissertation :
Et voilà, vous connaissez l'évolution de la pensée humaine sur divers thèmes sur le bout des doigts, et nous sommes le 17 Juin. Vous décidez de choisir la majestueuse dissertation, et votre détresse est déjà palpable. Comment s'y prendre pour réussir une dissertation ? C'est le cœur de cet article, que j'appuierai d'une de mes propres dissertations, pour allier à la théorie des exemples concrets.
Premier conseil : vous disposez de quatre heures. Et ce n'est pas pour rien ! C'est parce que vous avez besoin de ces quatre heures pour arriver à la meilleure version possible de votre dissertation. Elles vous donnent le temps d'établir un plan, mais aussi de vous appliquer lors de la rédaction, ce qui est essentiel. Donc, on ne sombre pas dans la précipitation pour sortir au plus vite de la salle (même si l'envie est grande). Après tout, qu'est-ce que quatre heures dans une vie ? Rien du tout.
La répartition du temps généralement conseillée est la suivante :
_ 10/15 minutes de choix du sujet
_ 45 minutes d'analyse, de problématisation, de plan
_ 30 minutes consacrés à l'introduction
_ 45 minutes pour la partie I
_ 45 minutes pour la partie II
_ 45 minutes pour la partie III
_ 15 minutes de conclusion
Première étape : le choix du sujet et le brainstorming.
Quand vous recevez la copie, prenez le temps de lire les différents sujets proposés. Lisez le texte plusieurs fois, assurez-vous de l'avoir compris. Repérez les notions auxquels se rattachent les divers sujets. Ensuite, réfléchissez quelques instants sur chacun d'eux en vous demandant sur lequel vous avez le plus de ressources. N'oubliez pas non plus de choisir un sujet qui vous plaît : une copie faite avec amour vous passionnera toujours plus, et l'examinateur le ressentira !
Dès que vous avez trouvé l'élu de votre cœur - dans notre cas, une dissertation sur l'art - commencez par vous demander quel type de plan vous est proposée par la question : un plan dialectique si la question laisse entendre une réponse de type "oui/non" et un plan par domaines si la question est ouverte, et ne met pas en valeur d'opposition particulière à première vue. Un plan dialectique correspond au sujet que nous allons traiter :
"L'art nous éloigne t-il du réel ?" ; un plan par domaines s'apparente à une question du type
"Pourquoi se cultiver ?".
Dès que vous avez effectué ceci, je vous propose un "brainstorming", littéralement une tempête de cerveaux : il s'agit de vous poser, de
ne rien écrire, et de réfléchir pendant quelques minutes aux idées qui vous viennent en tête pour répondre à ce sujet. Si vous avez peur de les oublier, prenez un brouillon et nommez-le "boîte à idées" pour noter tout ce qui vous passe par la tête. Cette étape permet de ne pas se jeter avidement sur sa copie en écrivant des inepties parfois regrettables.. Vous avez quatre heures, alors autant en profiter !
Normalement, après cet épisode de réflexion intense, un plan doit vaguement se dessiner dans votre esprit, et l'énoncé vous paraître plus clair. Ainsi, vous pouvez passer à la phase suivante : l'analyse de la question posée.
Deuxième étape : l'analyse de la question.
/!\ Attention, ici les extraits de copies sont extrêmement détaillés et structurés car
c'est la version finale ! Dans votre brouillon, prenez des notes et
n'inscrivez que les idées les plus importantes.. à moins que vous ne
soyez des Flash Gordon de l'écriture. /!\
Code couleur : Toutes les phrases en bleu clair et en italique correspondent aux citations extraites de ma copie. Le rouge foncé souligné désigne tout ce qui permet de structurer la copie, de donner des indications au correcteur sur le travail effectué. Le rouge clair en gras met en lumière les idées proposées.
Après la première étape, définissez les mots de la question au brouillon : le sujet que je vous propose est
"L'art nous éloigne t-il du réel ?". Ici, il faut donner du sens aux termes "art", "éloigne", et "réel".
Vous pouvez procéder par le rappel de définitions ou concepts étudiés en cours, tel c'est le cas pour l'art :
"La question qui nous est proposée interroge la notion de l'art et sa relation avec ce que nous comprenons comme étant le "réel". Tout d'abord, il est essentiel d'expliciter ce qu'est l'art : celui-ci se construit selon deux oppositions ; la première est celle avec la nature, puisque l'art est issu d'une activité humaine et donc réfléchie, contrairement aux produits naturels qui sont, eux, spontanés. L'art tend, de manière générale, à la reproduction de cette même nature. Ensuite, l'art se distingue depuis le XVIIème siècle de la technique : effectivement, l'art ou les "beaux-arts" a pour finalité le beau ; l'art est une finalité en soi, alors que la technique ou les "arts et métiers" possède un aspect utilitaire. Les beaux-arts comprennent les domaines suivants : peinture, littérature, musique, danse, théâtre, sculpture, photographie, cinéma."
Vous pouvez aussi définir les mots en leur cherchant des synonymes, comme avec le mot "éloigne" ou "réel" ..
"Quant au terme "éloigne" présent dans notre interrogation, il peut se définir comme ce qui s'écarte, ce qui se détache, se démarque ou encore se différencie. Enfin, la notion de "réel" sous-entend la réalité c'est-à-dire notre environnement, notre vie, et toutes les actions ou faits qui ont pour nous un quotient de vérité." ... ou encore procéder par des oppositions "Le réel englobe aussi la nature, et s'oppose à la conception d'imaginaire".
Quand vous avez bien défini votre sujet, et qu'il devient donc plus clair dans votre esprit, vous devez le reformuler grâce aux définitions que vous avez donné précédemment : cela prouve que vous avez bien cerné le sujet et oriente la future problématisation :
"Ainsi, la question qui nous est posée nous invite à nous demander si les
produits issus d'une activité humaine ayant pour visée le beau se
différencient, s'écartent voire font totalement abstraction de cet environnement auquel nous donnons un quotient de vérité".
Ensuite, il faut montrer qu'il y a une opposition plus ou moins nuancée présente dans la question. Ce travail se fait également au brouillon. Il s'agit de commencer par une première évidence sous-entendue par le problème :
"D'une part, nous pouvons accepter le fait que l'art se détache du réel et du vrai voire le déstructure totalement." ; cette première évidence étant contrecarrée par une seconde évidence s'y opposant
"Néanmoins, le réel et la nature étant les premières sources d'inspiration de l'art, ses premiers modèles, l'art ne tend t-il pas dans ce cas-là à converger vers ceux-ci voire à les reproduire ?". Ensuite, mettez en évidence ce paradoxe pour montrer à votre examinateur là où vous voulez en venir :
"Nous voyons donc que cette question met en lumière un paradoxe."
Enfin, pour arriver au terme de la compréhension de la question posée, il vous faut problématiser. Le processus de définition, de reformulation puis de paradoxe vous a progressivement entraîné sur la problématique, qui devrait se révéler un jeu d'enfants. Celle-ci consiste à faire ressortir de la question le problème que vous allez étudier, et auquel vous allez donner trois perspectives : ici, les deux premières perspectives doivent s'opposer
"De la sorte, le problème est de savoir si l'art ou les "beaux-arts" se situent dans une perspective d'imitation et de reproduction de la réalité et de la nature, auquel cas ceux-ci seraient les buts même de l'art ; ou si, au contraire, l'art ne peut répondre à cette prétention car il est une médiation du réel, et qu'il tend à le détourner voire à le déstructurer totalement." ; la formule "Le problème est de savoir si ... ou bien si .." peut être réutilisée dans chaque copie, elle structure votre problématisation et permet au correcteur de voir où vous le menez. Ensuite, il faut dépasser cette première opposition pour arriver à une troisième partie, qui reflète en général votre partie pris. Il existe plusieurs solutions pour trouver la fameuse dernière partie, mais je suis une adepte de la technique kantienne qui consiste à dépasser les deux, c'est-à-dire à aller au-delà, en montrant que les deux perspectives présentées se complètent, et qu'on ne peut se limiter à une seule :
"Enfin, nous pouvons chercher à dépasser cette aporie en nous demandant si l'art ne recrée pas sa propre réalité, éloignée du réel tout en se rapprochant et ayant un lien avec lui : dès lors, l'art apparaîtrait comme un dépassement du réel au sein du réel."
Troisième étape : la construction du plan.
Le travail de problématisation précédemment effectué permet de distinguer trois parties du plan. Ainsi, je vous conseille de prendre trois brouillons différents, et d'écrire sur chacun des trois le titre d'une grande partie de votre plan. Ici, cela donnerait :
_ Brouillon 1 : L'art est imitation et reproduction de réalité, qui est son but même.
_ Brouillon 2 : L'art est détournement voire déstructuration du réel car il n'est qu'une médiation.
_ Brouillon 3: L'art est un dépassement du réel au sein du réel.
Ensuite, pour vous éviter de trop détailler - on ne fait que le brouillon, pas la rédaction finale -, il est mieux de découper chaque brouillon en trois sous-parties, a), b), et c). En effet, les plans de philosophie sont constitués de trois parties et de trois sous-parties dans l'idéal. Grâce à votre "boîte à idées" vous allez placer chaque idée dans un brouillon, et dans une sous-partie. Il se peut aussi que vous abandonniez des idées en cours de route..
Quand vous avez réparti vos idées, réfléchissez à l'ordre dans lequel elles sont : effectivement, tout bon plan se doit d'être progressif, donc d'aller de l'idée la plus simple à la plus complexe. Si vous n'êtes pas satisfaits de l'ordre dans lequel vous avez premièrement disposer vos idées, échangez les a), b), et c) de place.
Après la répartition, nous arrivons au plan suivant :
I - L'art est imitation et reproduction de réalité, qui est son but même.
a) La réaction superficielle de l'Homme d'identification de l'art au réel. Exemple :
L'Origine du monde, Courbet.
b) L'art se positionne dans un rapport de relation à la réalité, et permet d'accéder à la réalité des essences. Exemple :
Poétique, Aristote.
c) L'art est reproduction voire imitation du réel. Exemple : le courant réaliste du début du XIXème siècle avec Stendhal et Balzac (
La Comédie Humaine).
II - L'art est détournement voire déstructuration du réel car il n'est qu'une médiation.
a) L'art est le plus éloigné du réel, car il opère une dégradation. Exemple :
République X, Platon.
b) L'art opère une rupture avec le réel, et le détourne. Exemple : les mouvements cubiste, fauviste, futuriste, expressionniste, dadaïste, surréaliste du début du XXème siècle avec
Le Bombardement de Guernica, Picasso.
c) L'art exerce une déstructuration totale de la réalité. Exemple : l’œuvre de Kandinsky.
III - L'art est un dépassement du réel au sein du réel.
a) L'art recrée une réalité qui lui est interne, non pas le réel comme nous le percevons. Exemple :
Madame Bovary, Flaubert.
b) L'art est interprétation du réel : il dégage un aspect de réalité sans reproduire sa totalité. Exemple : la photographie et le cinéma.
c) L'art n'est pas un imitateur, mais un créateur : il éduque notre perception. Exemples : citations d'Oscar Wilde et de Paul Klee, œuvre de Paul Klee, œuvre de Banksy.
Quatrième étape : la rédaction au propre.
Il vous reste environ 2h40 pour recopier au propre tout ce que vous avez écrit au brouillon.. Ainsi, votre introduction sera composée des différentes étapes de l'analyse de la question : définitions, reformulation, paradoxe, problématisation. Ensuite, il vous faut recopier et développer votre plan. N'oubliez pas de toujours faire des transitions entre vos différentes parties, et de bien choisir vos mots ! La philosophie est aussi un art de l'écriture, et vous vous devez de manier les mots avec précision. Rédigez dans un langage soutenu, et évitez les répétitions trop fréquentes.. Avaler un dictionnaire des synonymes juste avant l'épreuve ne serait pas une mauvaise idée.. Et n'oubliez pas la phrase de Camus :
"Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde".
Bien sûr, soignez aussi votre écriture et votre orthographe, l'examinateur trouvera tout de suite ça agréable. Et faites des alinéas, sautez des lignes pour aérer votre copie et montrer qu'elle est structurée : cela reflète votre pensée, et prouve que pour vous, la philo, c'est du gâteau. Si on reprend l'introduction, la structure devrait être la suivante :
"La question qui nous est
proposée interroge la notion de l'art et sa relation avec ce que nous
comprenons comme étant le "réel". Tout d'abord, il est essentiel d'expliciter ce qu'est l'art : celui-ci se construit selon deux oppositions ; la première est celle avec la nature,
puisque l'art est issu d'une activité humaine et donc réfléchie,
contrairement aux produits naturels qui sont, eux, spontanés. L'art
tend, de manière générale, à la reproduction de cette même nature.
Ensuite, l'art se distingue depuis le XVIIème siècle de la technique :
effectivement, l'art ou les "beaux-arts" a pour finalité le beau ;
l'art est une finalité en soi, alors que la technique ou les "arts et
métiers" possède un aspect utilitaire. Les beaux-arts comprennent les
domaines suivants : peinture, littérature, musique, danse, théâtre,
sculpture, photographie, cinéma.
Ainsi, la question qui nous est posée nous invite à nous demander si les
produits issus d'une activité humaine ayant pour visée le beau se
différencient, s'écartent voire font totalement abstraction de cet environnement auquel nous donnons un quotient de vérité.
D'une part, nous pouvons accepter le fait que l'art se détache du réel et du vrai voire le déstructure totalement. Néanmoins, le réel et la nature étant les premières sources d'inspiration de l'art, ses premiers modèles, l'art ne tend t-il pas dans ce cas-là à converger vers ceux-ci voire à les reproduire ? Nous voyons donc que cette question met en lumière un paradoxe.
De la sorte, le problème est de savoir si l'art ou les "beaux-arts" se situent dans une perspective d'imitation et de reproduction de la réalité et de la nature, auquel cas ceux-ci seraient les buts même de l'art ; ou si, au contraire, l'art ne peut répondre à cette prétention car il est une médiation du réel, et qu'il tend à le détourner voire à le déstructurer totalement. Enfin, nous pouvons chercher à dépasser cette aporie en
nous demandant si l'art ne recrée pas sa propre réalité, éloignée du
réel tout en se rapprochant et ayant un lien avec lui : dès lors, l'art apparaîtrait comme un dépassement du réel au sein du réel."
Si vous avez été attentif, ma technique est la suivante : chaque début de grande étape possède un grand aliéna, et chaque sous-partie possède un petit alinéa. Donc, il y aura des grands alinéas au début de l'introduction, de vos trois parties, et de la conclusion ; et des petits alinéas pour chaque sous-partie.
Cinquième étape : la rédaction de la conclusion.
Si vous avez du temps en plus - et je vous le souhaite -, vous pouvez rédiger votre conclusion au brouillon. Néanmoins, il est fort probable que vous ne puissiez pas contrôler le temps, malgré tous vos efforts, et que vous deviez faire la conclusion sans brouillon préalable.
Une conclusion de philosophie se déroule en plusieurs étapes : tout d'abord, il faut rappeler la problématique et le plan proposé pour y répondre "A la question de savoir si les beaux-arts nous détachent ou non de la réalité et de la nature, nous avons répondu en trois étapes : premièrement, nous avons insisté sur la possibilité pour l'art d'être reproduction ou imitation du réel. Ensuite, nous nous sommes attachés à l'éloignement des œuvres d'art d'avec le réel, provenant d'une triple cause : le rapport médiat de l’œuvre au réel, le détournement et la déréalisation qui peuvent être opérés par les artistes. Enfin, nous avons illustré le rapport perpétuel de l'art à la réalité, dans un dépassement de celle-ci en son sein propre."
Ensuite, vous avez tout intérêt à soumettre une ouverture à votre correcteur, afin de parfaire votre copie. Cette ouverture a pour but d'élargir votre réflexion, et pourquoi pas d'ouvrir sur une autre notion du programme. Cela montre qu'en plus d'avoir des capacités d'analyse, vous êtes quelqu'un qui pose des questions, et sait trouver de nouveaux problèmes ! "La relation de l'art au réel peut aussi rendre compte d'une autre forme d'expression de la réalité : celle de notre intériorité. Ainsi, tel que le préconisait Bergson, ne faudrait-il pas opérer une conversion de notre attention, et, par l'intuition, exprimer par l'art, nos sentiments les plus profonds que le langage se trouve incapable d'expliciter ?". Ici, le lien est donc fait avec la notion du langage, étudiée en Terminale Littéraire.
Autres conseils pour la réalisation d'une super dissertation.
Bien! Maintenant que voilà finit les grandes lignes, j'aimerais vous donner des conseils bonus pour que vous vous en sortiez le mieux possible le Jour J.
Par une généralité tu commenceras.
Je prends le parti de toujours commencer la première sous-partie de ma
première partie par une généralité acceptée par la plupart des êtres
humains. Cela permet de poser les premiers jalons, et de partir de l'idée la plus simpliste qui soit : en effet, une généralité peut être faussée, c'est une idée commune mais pourtant acceptée. Cela permet aussi de procéder à une remise en question de l'idée présentée, et donc de montrer que vous penser.
Dans notre cas, cette généralité correspond à la première sous-partie (a) La réaction superficielle de l'Homme d'identification de l'art au réel) de la première partie (I - L'art est imitation et reproduction de réalité, qui est son but même) avec pour exemple
L'Origine du monde, un tableau de Courbet.
"Attachons nous premièrement à la conception selon laquelle l'art tend vers ce que nous considérons et comprenons comme le réel, qui est son but ultime. Effectivement, les êtres humains reconnaissent eux-mêmes en l'art un rapport avec la réalité et la nature et peuvent déceler une reproduction ou une imitation fidèles : cela peut être corroboré avec des tableaux comme L'Origine du monde de Courbet, peinture du XIXème siècle. Ce tableau représente un sexe féminin, et chaque être humain apercevant le tableau établirait un lien entre la réalité d'un sexe féminin et celui présenté dans l'oeuvre d'art. Dès lors, nous pouvons affirmer que l'homme lui-même comprend l'art comme la réalité, et établit des liens avec celui-ci. Cette réaction face à l'art, que nous pourrions considérer comme superficielle car ne prenant pas en compte le fait que l'art soit une médiation, prouve cependant qu'art et réel se rapprochent voire se confondent dans l'esprit humain. Cette association spontanée effectuée par notre entendement nous entraîne donc sur la voie de l'art comme imitation."
Ta culture tu invoqueras.
Chacun de nous a un peu de culture générale, et les copies de philosophie sont le moyen parfait pour s'en servir : en effet, les philosophes ont beau être des personnages très sympathiques, le dernier livre lu ou dernier film vu peut totalement correspondre à la problématique, tout comme ce que vous avez étudié dans les classes précédentes. Cela apporte beaucoup à votre réflexion, en montrant que vous êtes ouverts, cultivés, et que vous savez établir des liens entre diverses disciplines .. Interdisciplinarité quand tu nous tiens, c'est Mme Vallaud-Belkacem qui va être ravie.
Dans cette copie, je me suis servie de mes connaissances sur le mouvement réaliste du XIXème pour alimenter la réflexion : "Cette compréhension de l'art comme imitation ou reproduction du réel réapparaît au XIXème siècle, à travers la littérature française et notamment le courant dit du "réalisme". Celui-ci utilise la technique de la mimésis afin de retranscrire la réalité de notre société et de ses mœurs. Pour cela, le réalisme va par exemple s'inspirer de faits divers, et même s'accompagner d'observations précises de la société telle qu'elle est. Nous pouvons retrouver cette conception de l'art chez deux écrivains appartenant au mouvement : Stendhal et Balzac. Le premier estime que le travail de l'auteur est de promener un miroir le long d'un chemin, ce qui lui permet de reproduire le réel dans ses romans. Le second, à travers son œuvre La Comédie Humaine, imite la réalité en recréant une véritable société, composée de profils sociaux, humains, économiques présents dans la société de la première moitié du XIXème siècle. Nous pouvons aussi noter l'utilisation régulière de la description par ces deux écrivains afin de rendre compte avec précision du réel. Néanmoins, nous pouvons remettre en cause cette conception de l'art, en nous demandant si elle n'est pas erronée du fait du rapport médiat et non immédiat des beaux-arts à la réalité."
De ton programme de Terminale tu te serviras.
Ne négligez pas non plus toutes les autres matières présentes dans votre programme. Par exemple, en Terminale Littéraire, nous étudions cette année Madame Bovary de Flaubert que je n'ai pas hésité à réutiliser dans cette dissertation sur l'art : en effet, j'ai mis en lien la réalité interne que l'auteur souhaite recréer avec ma troisième partie, soit le dépassement de l'art au sein même de celui-ci. "Cette notion de réalité interne propre à l’œuvre est particulièrement vraie pour le roman de Flaubert Madame Bovary, publié en 1857 : celui-ci présente Emma Bovary, une jeune femme appartenant à ce qui sera considéré comme la future classe moyenne, et sa vie monotone, routinière. L'action a lieu en Normandie, sous la monarchie de Juillet, dans un contexte tout à fait plausible dans le réel. La vie d'Emma aussi apparaît comme extrêmement proche de la réalité, si proche que Flaubert a été considéré comme un écrivain "réaliste" au même titre que Balzac ou Stendhal. Toutefois, l'auteur a toujours refusé cette appartenance au réalisme, précisant même qu'il le tenait en horreur. Cela se justifie par le fait que son œuvre d'art est créatrice de sa propre réalité sans viser à reproduire le plus fidèlement le réel. En effet, dans Madame Bovary, chaque action ou détail a une incidence sur la réalité du roman, mais non sur le réel tel que nous l'appréhendons. Dès lors, nous pouvons nous poser la question suivante : les œuvres d'art ne sont-elles pas créatrices de réel qu'imitatrices de celui-ci ?".
Dommage que les Terminale S soient dispensés de la notion "Existence et temps", dans laquelle ils auraient pu mettre en œuvre leur connaissance de la théorie de la relativité d'Einstein, étudiée en cours de Physique-Chimie...
Les formules lourdes tu oublieras.
Autre chose.. Dans ma copie, j'ai usé et abusé du "Nous allons donc.." ou du "Nous avons étudié..". Je vous le déconseille fortement ! Cela alourdit votre copie et la rend beaucoup moins agréable à lire. Essayez de substituer à ce "Nous" des formules plus impersonnelles et générales, comme le "Il". Au lieu d'écrire "La question proposée à notre étude", contentez-vous d'un simple "La question proposée". Néanmoins, il est assez compliqué d'enrayer du jour au lendemain une habitude si ancrée, donc apprenez à changer vos formules dans une session d'entraînement.
De questions tu parsèmeras ta réflexion.
Pour faire le lien entre les différentes sous-parties ou parties de votre dissertation, au lieu de céder aux bonnes vieilles et lourdes formules que nous venons de répudier, je vous propose de poser des questions remettant en question l'argument que vous venez de citer ou permettre une ouverture vers la prochaine perspective abordée. C'est le cas à la fin de mon analyse de Madame Bovary : la question permet d'anticiper sur la troisième sous-partie de la réflexion, à savoir que l'art est créateur de réel en tant qu'éducateur de notre perception. "En effet, dans Madame Bovary, chaque action ou détail a une incidence sur la réalité du roman, mais non sur le réel tel que nous l'appréhendons. Dès lors, nous pouvons nous poser la question suivante : les œuvres d'art ne sont-elles pas créatrices de réel qu'imitatrices de celui-ci ?"
Du croisement des notions tu te souviendras.
A la fin de votre riche année de philosophie, vous devez être capables d'établir des liens entre les différentes notions. Dans la question proposée ici, sur les rapports entre art et réel, la notion de la perception aurait aussi pu intervenir. Néanmoins, je ne l'avais pas étudiée au moment de la rédaction, et je ne l'ai toujours pas fait. Je ne pourrai donc pas vous en dire plus.
En revanche, sur une dissertation que j'ai traitée récemment, "Choisit-on ce que l'on est ?", la notion majeure était la liberté mais des liens pouvaient être faits avec les notions de la conscience, de l'inconscient ou de la culture, et une ouverture sur la politique pouvait être effectuée. Ce croisement entre les diverses notions enrichit la réflexion et prouve une fois de plus que vous maîtrisez avec brio le programme de philo.
Les repères tu utiliseras.
Votre professeur(e) de philosophie est aussi supposé vous enseigner les différents repères, qui sont des définitions pouvant vous aider dans la compréhension des textes et des idées et qui se construisent par opposition. N'hésitez pas à les réutiliser dans votre copie, car cela permet d'ajouter de la profondeur à votre questionnement. Dans cette dissertation, je me suis servie des repères "médiat / immédiat" pour justifier la distance que l'art impose au réel : "Analysons à présent l'art en tant que relation médiate au réel, c'est-à-dire indirecte, et donc ne pouvant atteindre ce dernier : l'art opère donc un détournement de la réalité et de la nature, et peut même se placer dans une perspective de déréalisation. Effectivement, les beaux-arts sont un support représentant ou ayant une prétention de représenter ce que nous considérons comme le réel. Dès lors, ce "support"" crée une barrière avec la réalité, en enlevant le caractère d'immédiateté."
Je suis désolée pour un si long article, mais j'espère que tous ces conseils en éclairerons quelques-uns.. Bien sûr, ces conseils sont tirés de mon expérience et de ma méthode de travail. Vous pouvez tout autant en avoir d'autres qui fonctionnent à merveille.
Sylphide.